PAUL NICKLEN

Croiser des icebergs comme celui qui causa la fin tragique du Titanic risque de ne plus se produire de sitôt. « Tant mieux », penseront la plupart ; personne n’a envie de finir comme Jack et Rose pendant sa croisière. Pourtant, ce n’est peut-être pas une si bonne nouvelle…

Réchauffement, changement, dérèglement… appelons cela comme on voudra. Il n’en reste pas moins que le problème est tout ce qu’il y a de plus réel — n’en déplaise aux climatosceptiques.

Les grands glaciers fondent plus rapidement qu’ils ne le devraient, c’est un fait. Et l’ampleur des dégâts est telle, que les scientifiques ont dernièrement imaginé une « solution » quelque peu désespérée…

L’Antarctique occidental — ou Antarctique de l’Ouest — est l’une des deux principales régions du « Continent blanc ». Et il se trouve que sa calotte polaire est devenue, au cours des dernières décennies, très instable. Des études antérieures ont démontré que l’inlandsis perdait davantage de glace qu’il n’en gagnait avec les chutes de neige. Les conséquences, s’il venait à basculer, pourraient être désastreuses. En effet, son « effondrement » devrait entraîner une élévation du niveau de la mer d’environ 3 mètres à travers le monde, mettant en péril des villes comme New York, Shanghai ou Tokyo.

Anders Levermann, spécialiste des sciences climatiques à l’Institut Potsdam de recherche sur les impacts du climat en Allemagne déclare sans équivoque : « Nous sommes déjà à un point de non-retour si nous ne faisons rien ».

Levermann et son équipe proposent de stabiliser la calotte polaire de l’Antarctique ouest en déposant à sa surface une neige d’origine artificielle. À travers leurs études en quête d’éventuelles solutions, ils ont découvert qu’il ne faudrait pas moins 7 400 milliards de tonnes de neige projetée pendant 10 années consécutives sur la calotte pour protéger la couche de glace et la stabiliser.

« Nous étudions la possibilité de stabiliser les deux glaciers — le glacier de l’île du Pin et le glacier de Thwaites — en pompant de l’eau de mer sur la zone critique », écrivent les auteurs de cette nouvelle étude.

Nathan Kurtz/NASA

Le surplus d’eau de mer serait alors pompé pour ensuite être transformé en neige en passant par des canons. D’après eux, ce dépôt « imiterait le type de précipitation qui se produit naturellement sur la majeure partie de la calotte ».

L’idée paraît complètement absurde aux premiers abords, mais pas impossible selon la récente étude. Pourtant, les chercheurs qui en sont à l’origine ne la proposent pas sérieusement. En soumettant ce procédé quelque peu « farfelu », ils veulent souligner le sérieux de ce qui se passe au pôle Sud et dans le monde en général.

« Je ne propose pas de faire ce que nous avons montré possible », confie Levermann à Brian Kahn à Earther. « Les gens doivent comprendre que si nous ne voulons pas perdre nos villes, nous devons faire quelque chose. Nous avons juste présenté une possibilité. »

Une opération d’une telle envergure impliquerait d’énormes défis techniques ; il faudrait près de 12 000 éoliennes pour l’énergie nécessaire à la collecte et la congélation d’eau de mer à déposer au sommet des glaciers.

L’adoption d’un plan aussi radical comporte des risques à bien des égards. Dans l’idée de sauver la banquise, nous pourrions détruire l’une des zones naturelles les plus précieuses et causer des perturbations indescriptibles à la faune — terrestre et aquatique — locale.

Cette solution reste néanmoins purement théorique. Quand bien même l’on pourrait fournir suffisamment d’équipement et de puissance pour travailler dans l’un des environnements les plus difficiles de notre planète, le processus pourrait s’avérer complètement vain si rien n’est fait pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre. Mettre fin aux énergies fossiles reste alors le meilleur moyen de faire face à la crise climatique.

Il ne s’agit encore que d’une idée parmi tant d’autres. Les émissions mondiales continuent d’augmenter et des études comme celle-ci soulignent combien de dommages nous avons déjà causés à la planète et quel effort monumental est nécessaire pour revenir à la sécurité : « L’absurdité apparente de cette initiative… reflète la dimension stupéfiante du problème du niveau de la mer. Pour prévenir un risque sans précédent, l’humanité devra peut-être faire un effort sans précédent ».


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