Dans l’inconscient collectif, la fourmi est considérée comme un insecte particulièrement travailleur : souvent décrite comme un hyménoptère assidu et appliqué, le mythe qui règne autour de la fourmi a la vie dure.

D’ailleurs, l’expression « travail de fourmi » traduit bien, sûrement autant que la fameuse fable de Jean de La Fontaine « la cigale et la fourmi », ce concept, qui ne serait, en fait, qu’une idée préconçue partiellement vraie, d’après une étude américaine…

Une découverte étonnante

En 2015, une équipe de chercheurs américains de l’Université de l’Arizona a mené une étude sur un groupe de fourmis ouvrières pour analyser leur comportement.

Après leur avoir attribué un code couleur (trois petits points de peinture sur leur mandibule et sur la tête) et installé une caméra haute définition au sein d’une colonie, les scientifiques ont fait une découverte très étrange : près de 40 % des fourmis ne faisaient absolument rien.

Durant les deux semaines d’observation, les enregistrements vidéos ont révélé que même parmi les fourmis les plus travailleuses, environ 72 % d’entre elles flânent au moins la moitié du temps.

Dans les faits, seuls 2,6 % du groupe entier de fourmis sont actifs sans arrêt. « Elles ne font que rester assises. Et chaque fois qu’elles font autre chose que de ne rien faire, elles font des corvées autour du nid, comme un peu de soins dans la couvée […] » déclare le Directeur de ladite étude et entomologiste Daniel Charbonneau.

Mais la réalité est bien plus complexe que cela : si nous pouvons penser de prime abord que cette surprenante tendance à la paresse n’est qu’un défaut que nous n’avions pas découvert aux fourmis auparavant, il semble que l’oisiveté n’est pas si inutile que ça…

Charlsfrd, Pixabay

Un défaut qui ne l’est pas tant que ça

Affirmer que cette étude prouve que les fourmis sont en fait des insectes paresseux ne peut être vrai que si l’on estime que la paresse est un défaut.

Seulement, il faut comprendre que c’est justement parce que les fourmis sont très travailleuses et on ne peut plus optimales qu’elles ont développé des techniques qui le sont tout autant.

Ainsi, le large pourcentage de fourmis ouvrières inactives ne le sont pas par pure fainéantise, mais pour le bon fonctionnement du groupe entier.

L’étude en écologie comportementale et sociobiologie conduite par le Professeur Charbonneau et son équipe explique qu’elles jouent un rôle aussi important dans la colonie que les fourmis qui ne cessent de travailler : loin de ralentir le groupe, les fourmis ouvrières inactives servent de « main d’œuvre de réserve » au cas où les fourmis actives ont besoin d’être remplacées.

D’ailleurs, lorsque le Professeur Charbonneau a volontairement retiré l’équipe de fourmis qui travaillait le plus, les « paresseuses » ont automatiquement pris la relève, sans broncher.

Il explique ce comportement ingénieux comme suit : « Lorsque la colonie perd des ouvriers, il est logique de les remplacer par des fourmis qui ne sont pas déjà en train de poursuivre d’autres tâches ».

De plus, au regard des missions qu’elles ont à effectuer, comme creuser des tunnels, construire des nids, prendre soin des œufs…, les embouteillages engendrés risqueraient davantage de freiner la cadence plutôt que de leur permettre d’être entièrement productives.

Ici, nous pouvons donc nous rendre compte de combien la division des tâches, dont fait partie la paresse sélective, est importante pour qu’un groupe, une société, puisse fonctionner correctement.


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