Nos yeux nous cachent de nombreuses choses. Comme lorsque nous nous plaçons face à un miroir et que l’on regarde autour de nous (en ne bougeant que les yeux). Le reflet est bien là devant nous, mais peu importe nos efforts, nous ne verrons jamais nos yeux bouger.
Sans que l’on s’en rende compte, nous devenons brièvement aveugles des centaines de fois par jour. C’est ce que l’on appelle le « masquage saccadé ».
Ce phénomène où le mouvement et la vision humaine ne s’accordent pas, serait ainsi l’un des points faibles de notre œil.
Les objets en déplacement, comme les trains ou les jambes de chevaux de course, nous ont toujours paru relativement flous. Même chose lorsque c’est nous qui nous déplaçons rapidement, le monde alentour se brouille. Quoique ceci ne se produise pas systématiquement à chaque fois que nos yeux se mettent à bouger. Ce qui est bien heureux dès lors que cela aurait impliqué d’avoir le vertige tout le temps.
Pour éviter cette gêne constante, le cerveau humain s’est vu évoluer. Et ce, de façon à ce que le traitement visuel s’arrête durant le mouvement des yeux avant de redémarrer lorsqu’ils sont de nouveau statiques. D’où une très brève cécité d’environ 50 millisecondes durant la « saccade ».
Sauf que même en un aussi court laps de temps, nous risquons toujours de rater des événements visuels majeurs, comme l’apparition d’un éclair de lumière. Et bien que moins d’une seconde d’aveuglement ne semble pas si grave, il faut garder à l’esprit que ces minuscules instants se produisent des milliers de fois par jour.
Ainsi en additionnant la durée de toutes les fois où un masquage saccadé s’est produit en une journée, l’on constate que nous devenons aveugles environ 40 minutes toutes les 24 heures.
Certes, nous avons donc évité le mal des transports chronique, mais à quel prix ?
Bien entendu, nos yeux nous faussent parfois compagnie, notamment en cas d’illusions d’optique. Mais la confiance aveugle que l’on a vis-à-vis d’eux l’emporte généralement le plus souvent.
Celle-ci est par exemple parfaitement illustrée par l’expression : « je l’ai vu de mes propres yeux », pensant que « c’est forcément arrivé », et non pas « je peux me tromper, la vision est compliquée ! » puisqu’il serait effectivement difficile de croire que ce que nous voyons et percevons au quotidien comme étant continue et en haute définition, présente secrètement pleins de vides.
Et pourtant, il existe bien une différence quasi fondamentale entre ce que nous pensons avoir vu et les données visuelles brutes qui pénètrent dans nos yeux étant donné que le cerveau intègre celles des deux yeux dans une même image, compensant au mieux nos angles morts naturels.
Qui plus est durant le masquage saccadé, notre perception du temps est également manipulée, notre horloge interne — étant suffisamment malléable — va permettre la suppression de la rupture juste après la saccade. Ce qui nous donne l’illusion que notre vision est parfaitement homogène et cohérente.
Tout ceci est bien sûr important pour maintenir une vision claire. Il n’empêche que des dangers liés à cela ne sont pas à exclure. Particulièrement lorsque nous roulons à grande vitesse.