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La renommée de la « qualité allemande » a pris un sacré coup à la suite de l’affaire Brandebourg (BER). À tel point que l’on pourrait presque croire que le projet de construction de cet aéroport a été touché par le « mauvais sort »…

L’histoire débute en 1989 après la chute du mur de Berlin. La planification d’un nouvel aéroport avait été annoncée et à l’époque, il était devenu évident que la nouvelle capitale — maintenant réunifiée — aurait besoin d’un aéroport moderne fonctionnellement plus efficace pour gérer le transport des voyageurs comparativement à ses deux vieux aéroports — datant de la guerre froide : Tegel (dans l’ancien Berlin-Ouest) et Schönefeld (dans l’ancien Berlin-Est).

Or sa date d’ouverture n’a cessé de se faire reporter et l’échéance est maintenant retardée de près de 3000 jours — l’objectif officiel visant désormais octobre 2020 même si certains pensent foncièrement que la meilleure solution serait plutôt de le démolir pour tout reconstruire.

Car à priori, la construction du BER a rencontré maintes complications depuis son premier échec d’inauguration en 2006 dont des retards incroyablement longs, des équipements défectueux, et des coûts qui ont dépassé le budget initial de 3,5 fois — de 1,7 à plus de 5 milliards d’euros.

Une cérémonie d’ouverture, à laquelle devaient assister Angela Merkel et 10 000 invités, était prévue en 2012, mais elle aurait été annulée en raison d’une défaillance des alarmes incendie et des extracteurs de fumée. Mais il s’est avéré que ce n’était que la partie visible de l’iceberg, car depuis lors, l’aéroport a été marqué par un catalogue de défauts techniques majeurs.

Selon Deutsche Welle (DW), un radiodiffuseur allemand, 90 kilomètres de câbles ont été mal installés, 4000 portes ont été numérotées de manière incorrecte, les escaliers mécaniques étaient trop courts et la ligne d’urgence vers le service d’incendie était défectueuse. Il a également été signalé que le toit de l’aéroport pesait deux fois plus que le poids autorisé et qu’il y avait une telle pénurie de guichets d’enregistrement que les planificateurs ont proposé à certaines compagnies aériennes d’inscrire leurs passagers dans des tentes devant le terminal — une décision à laquelle les compagnies aériennes se sont naturellement opposées.

Imanuel Marcus.

Jörg Stroedter, du comité des aéroports au parlement de Berlin, a déclaré à BBC Capital que de telles erreurs, et la décision de les corriger au lieu de tout recommencer expliquent en grande partie la flambée des coûts. L’échec de l’ouverture de l’aéroport en 2012 « aurait dû aboutir à la décision de vider totalement le bâtiment et de démanteler toutes les installations compliquées », a-t-il indiqué. « Si cela s’était produit, l’aéroport serait déjà fonctionnel depuis longtemps, avec des installations plus récentes et moins complexes ».

Effectivement on pourrait alors se demander pourquoi, dès que ces nombreux problèmes se sont révélés, la société aéroportuaire de Berlin n’a pas décidé d’abandonner le projet et de repartir ex nihilo.

À bien des égards, il s’agit d’un exemple classique de ce que l’on appelle l’« illusion du coût irrécupérable » ; les personnes (ou dans ce cas, les organisations) hésitent souvent à réduire leurs pertes alors qu’elles ont déjà investi du temps ou des ressources dans quelque chose, même si cela semblerait logique de le faire. Il s’agit d’un phénomène qui ne concerne pas uniquement les projets de grande envergure et à coût élevé tel que celui-ci, mais aussi une façon de penser qui peut se manifester dans la vie professionnelle quotidienne.

Toutefois, l’aéroport BER n’est plus aussi désertique qu’au départ, car entretemps, il est devenu — d’une façon totalement improbable — une véritable attraction : un bel exemple de schadenfreude, où des touristes payent pour faire le tour de l’« aéroport fantôme »…


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